[Illustration: FIG. 8. Les lignes epaisses representent les couches basaltiques; les lignes fines, les couches sous-marines inferieures; les lignes pointillees, les couches feldspathiques superieures. Les dikes sont indiques par des hachures transversales.]

La crete ainsi que les collines de Flagstaff et de Barn sont sillonnees de dikes, dont plusieurs conservent un parallelisme remarquable suivant une direction N.-N.-W--S.-S.-E. Les dikes sont formes principalement d'une roche a laquelle de grands cristaux d'augite donnent la structure porphyrique, d'autres dikes sont formes d'un trapp brun a grains fins. La plupart de ces dikes sont recouverts d'une couche brillante[3], epaisse de un a deux dixiemes de pouce, fusible en un email noir, contrairement a ce qui se produit pour la retinite veritable. Cette couche est evidemment analogue au revetement superficiel brillant qu'on observe sur un grand nombre de coulees de lave. On peut suivre souvent les dikes sur de grandes surfaces, tant dans le sens horizontal que dans le sens vertical, et ils paraissent conserver une epaisseur a peu pres toujours uniforme[4]. M. Seale rapporte qu'un dike situe pres du Barn ne decroit en largeur que de 4 pouces seulement sur toute sa hauteur, qui est de 1.260 pieds,--de 9 pieds a la base elle se reduit a 8 pieds 8 pouces au sommet. Dans cette crete la direction suivie par les dikes parait avoir ete surtout determinee par l'alternance de couches tendres et dures; souvent ils sont intimement associes aux couches les plus dures, et restent paralleles sur des longueurs si considerables que frequemment il devient impossible de distinguer les bancs qui sont de vrais dikes, des nappes de lave. Quoique les dikes soient si nombreux sur cette crete, ils sont plus nombreux encore dans les vallees voisines situees au sud, a tel point que je n'en ai vu nulle part un aussi grand nombre. Dans ces vallees ils ont une orientation moins reguliere et couvrent le sol d'un reseau semblable a une toile d'araignee; en certains points la surface du sol parait meme exclusivement constituee par des dikes entrelaces.

Cette disposition complexe des dikes, la forte inclinaison et l'anticlinal des couches de la serie inferieure recouvertes aux extremites opposees de cette crete par deux grandes masses rocheuses, d'age et de composition differents, devaient, a mon avis, conduire presque infailliblement a une fausse interpretation de cette coupe. On a meme suppose que la region qui nous occupe avait fait partie d'un cratere, mais cette opinion s'ecarte tellement de la verite que le sommet de Flagstaff Hill a constitue autrefois l'extremite inferieure d'une nappe de lave et de cendres ejaculees par la crete crateriforme centrale. A en juger par la pente des coulees contemporaines dans une partie voisine et non bouleversee de l'ile, les couches de Flagstaff Hill doivent avoir ete soulevees de 1.200 pieds au moins, et probablement d'une quantite beaucoup plus considerable encore, car les grands dikes tronques qu'on observe au sommet de la colline demontrent qu'elle a ete fortement denudee. Le sommet de Flagstaff Hill atteint a peu pres la meme hauteur que la crete crateriforme, et, avant d'avoir subi une denudation, il etait probablement plus eleve que cette crete, dont il est separe par une region fort etendue et beaucoup plus basse; par consequent, nous constatons ici que l'extremite inferieure d'un systeme de coulees de lave a ete redressee de maniere a atteindre une altitude egale ou meme peut-etre superieure a celle du cratere sur les flancs duquel elles ont coule originairement. Je crois que les dislocations de cette amplitude sont extremement rares[5] dans les regions volcaniques. La formation de dikes aussi nombreux dans cette partie de l'ile prouve que la surface de la region doit avoir subi une dislocation tout a fait extraordinaire. Sur la crete entre les collines de Flagstaff et de Barn cette dislocation ou extension s'est probablement produite apres le redressement des couches, ou a peut-etre suivi immediatement ce phenomene, car, si les couches avaient ete alors horizontales, elles auraient fort probablement ete fissurees et injectees dans le sens transversal et non suivant le plan de stratification.

Charles Darwin

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