Malgre ces differences d'inclinaison, leur similitude de forme exterieure et de constitution tant au sommet qu'a la base, leur disposition en une ligne courbe en presentant le flanc le plus escarpe vers l'interieur de l'ile, tout semble prouver qu'elles faisaient originairement partie d'un plateau qui s'etendait probablement autour d'une grande partie de la circonference de l'ile, comme je l'ai fait remarquer plus haut. Les couches superieures ont coule bien certainement a l'etat de lave, et se sont probablement etalees sous la mer, comme c'est aussi le cas pour les masses feldspathiques inferieures. Comment donc ces couches ont-elles ete amenees a prendre leur position actuelle, et d'ou ont-elles fait eruption?

Au centre de l'ile il existe des montagnes elevees[7], mais elles sont separees du flanc escarpe interieur de ces collines par une large etendue de pays de moindre altitude; d'ailleurs les montagnes de l'interieur paraissent avoir ete le centre d'ejaculation de grandes coulees de lave basaltique qui, se retrecissant pour passer entre les pieds de ces collines, s'etalent ensuite sur la plaine cotiere. Des roches basaltiques forment un cercle grossierement dessine autour des cotes de Sainte-Helene, et a l'ile Maurice on voit les restes d'un cercle semblable entourant tout au moins une partie de l'ile, sinon l'ile entiere; la meme question revient immediatement se poser ici: comment ces masses ont-elles ete amenees a prendre leur position actuelle et de quel centre eruptif proviennent-elles? Quelle que puisse etre la reponse, elle s'applique probablement a ces trois cas. Nous reviendrons sur ce sujet dans un autre chapitre.

_Vallees voisines de la cote_.--Elles sont larges, tres-plates et bordees ordinairement de falaises peu elevees. Certaines parties de la plaine basaltique sont parfois isolees par ces vallees, soit en partie, soit meme completement; l'espace ou la ville de Praya est batie offre un exemple de ce fait. Le fond de la grande vallee qui s'etend a l'ouest de la ville est rempli, jusqu'a la profondeur de plus de 20 pieds, de galets bien arrondis, qui sont solidement cimentes, en certains endroits, par une matiere calcaire blanche. La forme de ces vallees demontre a toute evidence qu'elles ont ete creusees par les vagues de la mer, pendant la duree de ce soulevement uniforme du pays atteste par le depot calcaire horizontal avec restes d'organismes marins actuels. En tenant compte de la conservation parfaite des coquilles contenues dans cette couche, il est etrange que je n'aie pu trouver un seul fragment de coquille dans le conglomerat qui occupe le fond des vallees. Dans la vallee qui se trouve a l'ouest de la ville, le lit de galets est coupe par une seconde vallee se greffant a la premiere sous forme d'affluent; mais cette derniere vallee meme parait beaucoup trop large et presente un fond beaucoup trop plat pour avoir ete creusee par la petite quantite d'eau qui peut tomber pendant la saison humide, fort courte en cette contree, car pendant le reste de l'annee ces vallees sont absolument a sec.

_Conglomerats recents_.--J'ai trouve sur les rivages de Quail-island des fragments de briques, des morceaux de fer, des galets et de grands fragments de basalte, unis en un conglomerat solide par un ciment peu abondant, forme d'une matiere calcaire impure. Je puis dire, comme preuve de l'extreme solidite de ce conglomerat recent, que je me suis efforce de degager, a l'aide d'un lourd marteau de geologue, un gros morceau de fer enchasse dans le banc un peu au-dessus de la laisse de basse mer, mais que j'ai ete absolument incapable d'y parvenir.

Notes:

[1] La configuration de la cote, la position des villages, des ruisseaux et de la plupart des collines representes dans cette figure, ont ete copiees de la carte dressee a bord du _H.M.S. Leven_. Les collines a sommet plat (A B C, etc.) y ont ete reportees d'une maniere purement approximative, pour rendre ma description plus claire.

[2] Je suis fort reconnaissant a M. E.-W. Brayley de m'avoir indique a ce sujet les travaux suivants: Faraday: _Edinburgh, New philosophical Journal_, vol.

Charles Darwin

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