Du haut de l'eminence centrale, j'ai compte vingt a trente de ces cones d'eruption. Le sommet tronque de la plupart d'entre eux est coupe obliquement, et tous presentent une pente vers le sud-est, point d'ou souffle le vent alize[2]. Cette structure est due, sans aucun doute, a l'action du vent, qui a pousse en plus grande quantite dans un sens que dans l'autre les fragments et les cendres rejetes pendant les eruptions. M. Moreau de Jonnes a fait une observation semblable pour les volcans des Antilles.
_Bombes volcaniques_.--On les rencontre en grand nombre, repandues sur le sol, et quelques-unes d'entre elles se trouvent a une distance considerable de tout point d'eruption. Leur dimension varie de celle d'une pomme a celle du corps d'un homme; elles sont spheriques ou pyriformes, et l'extremite posterieure (qui repondrait a la queue d'une comete) est irreguliere et herissee de pointes saillantes; elle peut meme etre concave. Leur surface est rugueuse et traversee de fentes ramifiees; leur structure interne est irregulierement scoriacee et compacte, ou offre un aspect symetrique fort remarquable. La gravure represente tres exactement un segment irregulier d'une bombe appartenant a cette derniere espece, et dont j'ai trouve plusieurs specimens. Elle avait a peu pres la grandeur d'une tete d'homme. La partie interne tout entiere est grossierement celluleuse; le diametre moyen des vacuoles est d'un dixieme de pouce environ, mais leur dimension decroit graduellement vers la partie externe de la bombe. Cette partie interne est entouree d'une croute de lave compacte, nettement limitee, offrant une epaisseur presque uniforme d'environ un tiers de pouce. La croute est recouverte d'une enveloppe un peu plus epaisse de lave finement celluleuse (dont les vacuoles varient en diametre d'un cinquantieme a un centieme de pouce), et qui forme la surface exterieure. La limite qui separe la croute de lave compacte de l'enduit scoriace externe est nettement definie. On peut facilement se rendre compte de cette structure en supposant qu'une masse de matiere visqueuse et scoriacee soit projetee dans l'air, et animee d'un mouvement rotatoire rapide. En effet, pendant que la croute exterieure se solidifiait par refroidissement (et prenait l'etat ou nous la voyons aujourd'hui), la force centrifuge, en reduisant la pression a l'interieur de la bombe, devait permettre aux vapeurs chaudes de dilater les vacuoles, mais celles-ci, comprimees par la meme force contre la croute deja solidifiee, devaient diminuer graduellement de volume, et a mesure qu'elles etaient plus rapprochees de cette croute externe, leur volume devait toujours aller se reduisant jusqu'au moment ou la partie interne etait emprisonnee dans une croute massive concentrique. Nous savons que des eclats peuvent etre projetes d'une meule[3] lorsqu'elle est animee d'un mouvement de rotation assez rapide, nous ne devons donc pas douter que la force centrifuge soit assez puissante pour modifier, comme nous le supposons ici, la structure d'une bombe encore a l'etat plastique. Des geologues ont fait observer que la forme exterieure d'une bombe nous revele immediatement l'histoire de sa course aerienne, et nous constatons maintenant que sa structure interne peut nous redire presque aussi clairement le mouvement rotatoire dont elle etait animee.
[Illustration: Fig. 3.--Fragment d'une bombe volcanique spherique, dont la partie interne grossierement celluleuse est entouree d'une couche de lave compacte recouverte d'une croute formee par une roche finement celluleuse.]
M. Bory de Saint-Vincent[4] a decrit des masses arrondies de lave trouvees a l'ile Bourbon, qui ont une structure tout a fait semblable; pourtant son interpretation (si je la comprends bien) est fort differente de celle que j'ai donnee, car il suppose que ces corps ont roule, comme des boules de neige, le long des flancs du cratere.
M. Beudant[5] a decrit de singulieres petites spheres d'obsidienne, dont le diametre ne depasse jamais 6 a 8 pouces, et qu'il a trouvees repandues a la surface du sol.