Une seconde coulee n'avait que 8 pouces d'epaisseur, en y comprenant les surfaces scoriacees inferieure et superieure. Avant d'avoir vu cette coupe, je n'aurais pas cru possible que la lave put se repandre en nappes aussi uniformement minces sur une surface qui est loin d'etre unie. Ces petites coulees ressemblent beaucoup par leur composition aux grands flots de lave de l'ile Albemarle qui doivent avoir presente, eux aussi, un haut degre de fluidite.
[Illustration: FIG. 14--Segment d'un tres petit centre d'eruption sur le rivage de Fresh-water Bay.]
_Fragments d'apparence platonique rejetes par ce cratere_.--Dans la lave et dans les scories de ce petit cratere j'ai trouve plusieurs fragments qui, par leur forme anguleuse, leur structure grenue, leur fragilite, l'action calorifique qu'ils ont subie, et par l'absence de vacuoles, ressemblent beaucoup aux fragments de roches primitives que les volcans de l'ile de l'Ascension rejettent quelquefois. Ces fragments consistent en albite vitreuse fortement usee et a clivages tres imparfaits, melangee d'un mineral bleu d'acier en grains semi-arrondis, a surface trouble et luisante. Les cristaux d'albite sont recouverts d'un oxyde de fer rouge qui semble etre un residu, et leurs plans de clivage sont parfois separes aussi par des couches excessivement fines de cet oxyde, dessinant sur le cristal des lignes semblables a celles d'un micrometre de verre. Il n'y avait pas de quartz. Le mineral bleu d'acier qui abonde dans la partie colonnaire, mais qui est absent dans les coulees derivant de ce pic, offre l'aspect d'un corps qui a subi une fusion, et presente rarement quelque trace de clivage. Pourtant j'ai pu demontrer par une mesure prise sur un echantillon que c'etait de l'augite. Dans un autre fragment, qui se distinguait de ses congeneres parce qu'il etait legerement celluleux et passait graduellement a la pate de la roche, les petits grains d'augite etaient assez bien cristallises. Quoiqu'il y ait, en apparence, une difference si considerable entre la lave des petites coulees, specialement entre leur croute scoriacee rouge, et un de ces fragments anguleux rejetes, que l'on pourrait prendre a premiere vue pour de la syenite, je crois cependant que la lave a ete formee par la fusion et le mouvement d'ecoulement d'une masse rocheuse dont la composition est absolument semblable a celle de ces fragments. Outre le specimen dont il vient d'etre question et ou nous voyons un fragment devenir legerement celluleux et se fondre dans la masse environnante, la surface de quelques-uns des grains d'augite bleu d'acier devient finement vacuolaire et passe a la pate englobante; d'autres grains sont dans un etat intermediaire. La pate semble consister en augite plus parfaitement fondue, ou, ce qui est plus probable, simplement modifiee par le mouvement de la masse, lorsque ce mineral etait a l'etat visqueux, et melangee d'oxyde de fer et d'albite vitreuse reduite en tres petits fragments. C'est probablement pour cette raison que l'augite fondue, abondante dans le pic, disparait dans les coulees. L'albite se trouve exactement au meme etat dans la lave et dans les fragments empates, sauf que la plupart des cristaux sont plus petits, mais ils paraissent moins abondants dans les fragments. Ceci pourrait cependant se produire naturellement par l'intumescence de la base augitique donnant lieu a un accroissement apparent de son volume. Il est interessant de suivre ainsi les phases par lesquelles passe une roche grenue et compacte pour se transformer d'abord en une lave celluleuse pseudo-porphyrique et finalement en scories rouges. La structure et la composition des fragments empates montrent qu'ils ont ete detaches d'une roche primitive et ont subi des alterations considerables par l'action volcanique ou, plus probablement, qu'ils ont ete arraches a la croute d'une masse de lave refroidie et cristallisee, ulterieurement brisee et refondue, et dont la croute a ete attaquee moins fortement que le reste de la masse par la nouvelle fusion et le nouveau mouvement qu'elle a subis.