Mais le trait le plus remarquable de la structure de ces vallees, c'est que, malgre la largeur de plusieurs milles qu'elles presentent dans leur region superieure, elles se retrecissent ordinairement vers leur extremite inferieure, a tel point qu'elles deviennent impraticables. Le _Surveyor-general_, Sir T. Mitchell[6], a tente vainement de remonter la gorge par laquelle la riviere Grose rejoint le Nepean, en marchant d'abord, et en rampant ensuite entre les grands blocs de gres ecroules; la vallee de la Grose forme cependant vers sa partie superieure, ainsi que je l'ai constate _de visu_, un bassin magnifique large de plusieurs milles, et elle est entouree de tous cotes par des falaises dont les sommets atteignent, a ce que l'on croit, une altitude qui n'est pas inferieure a 3.000 pieds au-dessus du niveau de la mer. Lorsqu'on conduit des bestiaux dans la vallee de la Wolgan, par un sentier que j'ai descendu et qui a ete, en partie, entaille dans le roc par les colons, ils ne peuvent pas s'echapper, car cette vallee est entouree completement par des falaises verticales, et a 8 milles plus bas elle se resserre au point que sa largeur, qui est d'un demi-mille en moyenne, se reduit a celle d'une simple fente dans laquelle ni homme ni bete ne saurait passer. Sir T. Mitchell[7] rapporte que la grande vallee ou coule la riviere Cox avec toutes ses ramifications se resserre a son confluent avec le Nepean en une gorge large de 2.200 yards et profonde de 1.000 pieds environ. On pourrait citer encore d'autres exemples semblables.
La premiere impression qu'on eprouve en constatant la correspondance des couches horizontales sur les deux cotes de ces vallees et de ces grandes depressions en amphitheatre, c'est qu'elles ont ete creusees principalement, comme les autres vallees, par l'action erosive des eaux; mais, quand on songe a la quantite enorme de roches qui, dans cette theorie, devraient avoir ete transportees au travers de simples gorges, ou meme de fentes, lors du creusement de la plupart des vallees dont nous venons de parler, on est porte a se demander si ces depressions n'ont pas ete formees par affaissement; pourtant, si nous considerons la forme des vallees avec leurs ramifications irregulieres et celle des promontoires etroits qui, partant des plateaux, s'avancent dans les vallees, nous sommes obliges d'abandonner cette maniere de voir. Il serait absurde d'attribuer la formation de ces depressions a l'action alluviale, et les eaux qui ruissellent du plateau ne descendent pas toujours dans la vallee au niveau le plus eleve, mais sur un des cotes de ses flancs en forme de golfe, comme je l'ai observe pres de Weatherboard. Des habitants m'ont dit qu'ils ne voient jamais une de ces falaises dont l'allure rappelle celle d'une baie, avec leurs promontoires fuyant a droite et a gauche, sans etre frappes de leur ressemblance avec une cote marine elevee. Il en est incontestablement ainsi; en outre, les beaux et nombreux ports de la cote actuelle de la Nouvelle-Galles du Sud avec leurs bras largement ramifies, et qui sont ordinairement relies a la mer par un etroit goulet large de 1 mille a un quart de mille traversant des falaises de gres, ressemblent aux grandes vallees de l'interieur, en miniature il est vrai. Mais alors se presente immediatement une grave difficulte: pourquoi la mer a-t-elle creuse ces depressions si etendues quoique circonscrites, dans un vaste plateau et a-t-elle laisse intactes de simples gorges au travers desquelles l'enorme masse des materiaux broyes doit avoir ete transportee tout entiere? La seule lumiere que je puisse apporter a la solution de cette enigme, c'est de faire observer que dans certaines mers il s'edifie des bancs affectant les formes les plus irregulieres, et que leurs bords sont si escarpes (comme nous l'avons vu plus haut) qu'il suffirait d'une erosion relativement faible pour les transformer en falaises. J'ai observe en plusieurs points de l'Amerique meridionale que les vagues peuvent former des falaises a pic, meme dans les ports entoures de tous cotes par les terres.