Le principal merite de ces recherches est d'avoir fourni des observations qui, non seulement, presentent un haut interet scientifique, mais dont quelques-unes ont permis de faire rejeter des erreurs couramment admises; d'appeler l'attention sur des phenomenes et des considerations qui avaient ete completement negliges par les geologues, mais qui ont exerce depuis lors une grande influence sur la genese des theories geologiques; et, enfin, de faire ressortir l'importance qui s'attache a des causes faibles et insignifiantes en apparence, mais dont quelques-unes donnent la clef de problemes geologiques du plus haut interet.
En visitant des contrees ou von Buch et d'autres geologues avaient cru trouver la preuve de la theorie des "crateres de soulevement", Darwin fut amene a demontrer que les faits pouvaient recevoir une interpretation tout a fait differente. Les idees emises d'abord par le celebre geologue et explorateur allemand, et presque universellement admises par ses compatriotes, avaient ete soutenues par Elie de Beaumont et par Dufrenoy, les chefs du mouvement geologique en France. Elles etaient pourtant vigoureusement combattues par Scrope et par Lyell en Angleterre, et par Constant Prevost et Virlet de l'autre cote de la Manche. Dans cet ouvrage, Darwin nous montre sur quelles faibles bases repose cette theorie d'apres laquelle les grands crateres circulaires des iles de l'Atlantique devraient leur origine a des ampoules gigantesques de la croute terrestre, qui, en crevant a leur sommet, auraient donne naissance aux crateres. Reconnaissant l'influence que l'injection de la lave exerce sur la structure des cones volcaniques, en accroissant leur masse et leur hauteur, il montre qu'en general les volcans sont edifies par des ejaculations repetees qui amenent une accumulation de matieres eruptives autour de l'orifice.
Cependant, quoiqu'il arrivat aux memes vues generales que Scrope et que Lyell sur l'origine des crateres volcaniques ordinaires, Darwin vit clairement que, dans certains cas, de grands crateres peuvent s'etre formes ou s'etre agrandis par l'affaissement du plancher, a la suite d'eruptions. L'importance de ce facteur auquel les geologues avaient accorde trop peu d'attention, a ete montree recemment par le professeur Dana dans son admirable ouvrage sur le Kilauea et d'autres grands volcans de l'archipel hawaien.
L'affaissement qui se produit autour d'un centre volcanique, et qui determine le plongement des couches environnantes, a ete mis en lumiere pour la premiere fois par Darwin, comme resultat de son premier travail sur les iles du Cap-Vert. Des exemples frappants du meme fait ont ete signales depuis en Islande par M. Robert et par d'autres, dans la Nouvelle-Zelande par M. Heaphy, et dans les iles occidentales de l'Ecosse par moi-meme.
A diverses reprises, Darwin appela l'attention des geologues sur le fait que les orifices volcaniques presentent entre eux des relations qu'on ne saurait expliquer sans admettre l'existence, dans la croute terrestre, de lignes de fracture le long desquelles les laves se sont fraye un chemin vers la surface. Mais en meme temps il vit clairement qu'il n'existait pas de preuves du passage de grands torrents de laves le long de ces fractures; il montra comment les plateaux les plus remarquables, formes de nappes de laves successives, peuvent avoir ete construits par des emissions repetees et moderees, emanant d'orifices volcaniques nombreux, distincts les uns des autres. Il insiste expressement sur la rapidite avec laquelle la denudation peut faire disparaitre les cones de cendres formes autour des orifices d'ejaculation, et les traces d'emissions successives de laves.
L'un des chapitres les plus remarquables du livre est celui ou l'auteur traite des effets de la denudation determinant l'erosion de l'appareil volcanique, au point de ne plus laisser subsister que des epaves ou troncons ruines de volcans. Il a eu l'occasion d'etudier une serie de cas permettant de suivre toutes les gradations des formes volcaniques, depuis les cones complets jusqu'aux masses bouchant les crateres, ou elles s'etaient solidifiees.